Du Rôle Social De La Littérature Chinoise

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Sinopsis

Chavannes Édouard – Du rôle social de la littérature chinoise : Emmanuel‑Édouard Chavannes, un sinologue français renommé, est né le 5 octobre 1865 à Lyon, d’une famille originaire de Charmoisy, à deux lieues au sud de Thonon. La religion réformée fut introduite dans cette région, en 1536, par les Bernois* et, à la fin du siècle, Charles‑Emmanuel de Savoie expulsa les protestants. Il est probable que parmi eux se trouvait Bernard Chavannes, qui aborda à Territet, dans la paroisse de Montreux, en 1602 et fut admis à la naturalisation. En descendent les membres actuels de la famille dont Édouard‑L., un botaniste lausannois et grand-père d’Édouard Chavannes.

Le texte que nous vous proposons est celui de sa leçon d’ouverture faite au Collège de France le 5 décembre 1893 : « Une littérature nous apparaît comme un ensemble de forces qui exercent une action puissante sur les esprits des hommes ; il importe de mesurer cette influence pour déterminer quel rôle elle joue dans l’immense concours de causes qui produisent un état social. C’est à ce second point de vue que nous considérerons les œuvres littéraires chinoises. […] Les Chinois paraissent bien avoir raison lorsqu’ils attribuent à leur littérature une influence moralisatrice. Les vertus essentielles que nous leur reconnaissons sont celles mêmes que leurs classiques exaltent le plus […]

Le loyalisme dont les Chinois font preuve, la vénération qu’ils ont pour leur souverain est d’accord avec cette théorie du droit divin de la monarchie qui est un des principaux éléments de leur philosophie de l’histoire. […] La famille n’est pas moins fortement constituée que l’État : elle repose aussi sur l’acceptation tacite d’une autorité supérieure, celle du père. Ici encore les faits et la littérature se répondent. On ne trouverait pas dans les classiques un seul texte qui excuserait l’adultère, pas un qui absoudrait le fils irrespectueux. Les rapports entre père et fils tels que nous les représente trop souvent Molière n’exciteraient chez un Chinois que l’indignation. […] Enfin chaque individu a été habitué, par les leçons mêmes qu’il a reçues dans l’école, à observer les règles d’une politesse minutieuse. […] Cet empire que les Chinois ont sur eux-mêmes est une des qualités qui frappent le plus un étranger. Tse Lou, disciple de Confucius, tombant blessé à mort sur le champ de bataille, rattacha la jugulaire de son casque pour expirer avec décence. […] L’histoire chinoise abonde en récits de beaux trépas inspirés uniquement par le désir qu’on a de ne pas déroger à ce qu’on se doit à soi-même. S’il est vrai que la vie ne soit que la méditation de la mort, il faut avouer que les livres qui rendent l’homme capable de se sacrifier avec une telle dignité sont bien aussi ceux qui sont le plus aptes à ennoblir son existence. La littérature chinoise, par sa diffusion, sa durée, son influence dans tous les domaines de la pensée et tous les actes de la vie, a donc été la grande éducatrice de la nation. »